Le procureur de République a requis ce vendredi, cinq ans d’emprisonnement, dont 18 mois ferme, à l’encontre du chauffeur du poids lourd percuté par un TER en octobre 2011 au passage à niveau de Saint-Médard-sur-Ille. Aucune peine n'est requise contre la SNCF.
Le "facteur premier" de cet accident, qui a fait trois morts à Saint-Médard-sur-Ille (Ille-et-Vilaine) en 2011, est le "comportement coupable, fautif" du chauffeur, "usé par la semaine de travail qu'il venait de passer" et dont "le degré d'inattention était très élevé", a estimé vendredi Delphine Dewailly, procureur adjoint, qui a tenu à hiérarchiser les responsabilités des prévenus, le chauffeur du camion et la SNCF. Elle a rappelé que ce chauffeur était tellement travailleur qu'il en avait oublié d'activer son chronotachygraphe pour contrôler son temps de conduite. La veille, il n'avait dormi que 5h30, "pas étonnant que sa vigilance ait pu être émoussée".
De la prison ferme pour le chauffeur ...
La magistrate a requis à l'encontre de Fabien Chauvet, qui a reconnu sa responsabilité dans l'accident, 5 ans de prison, dont 18 mois ferme, qui pourront être aménagés. Elle réclame une annulation du permis de conduire pour une durée à la discrétion du tribunal puis l'interdiction d'exercer une activité au volant d'un poids lourd.Delphine Dewailly a aussi estimé qu'il pouvait être envisagé une condamnation à l'encontre de la SNCF mais pour une "faute minime" par rapport à la "faute écrasante" du chauffeur.
... aucune peine requise contre la SNCF
La magistrate, qui n'a pas requis de peine à l'encontre de la SNCF, a notamment estimé qu'on pouvait lui reprocher de ne pas avoir ralenti la circulation des trains sur ce tronçon pour donner plus de temps aux poids lourds pour traverser le passage à niveau.Cette absence de peine à l'encontre de la SNCF est incompréhensible pour les parties civiles.
Lionel Labourdette, président Association des victimes de l'accident
de Saint-Médard-sur-Ille
/ Reportage : E. Pinault - B. Van Wassenhove
Elle a en revanche balayé les arguments tirés de la dangerosité supposée de ce passage à niveau en raison de la configuration des lieux et notamment de l'étroitesse de la chaussée.
"Bien sûr que les passages à niveau sont dangereux, je ne vais pas essayer de vous convaincre du contraire. Mais dans notre dossier, cette configuration insatisfaisante a-t-elle joué un rôle dans l'accident ?", a interrogé la magistrate.
Plusieurs accidents étaient déjà intervenus à cet endroit. Une collision entre un camion et un TER avait ainsi fait 71 blessés, le 26 novembre 2007. A la suite de cet accident, le Bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre avait émis des recommandations de sécurisation, qui n'ont pas toutes été mises en oeuvre.
La SNCF et le conseil départemental, en charge de la voirie, se sont renvoyé la responsabilité de cette inaction. "Est-il certain que, si ces travaux avaient été réalisés plus tôt, il n'y aurait pas eu cet accident ?", a demandé la magistrate. "Je ne suis pas sûre que vous puissiez le dire de manière certaine", a-t-elle estimé.
Le procès se poursuit ce vendredi après-midi par les plaidoiries en défense.